Laurent FAKHOURY, Directeur adjoint de l’IEDOM Martinique
Quelle est la tendance actuelle de l’industrie martiniquaise ?
En 2010, les résultats de l’enquête de conjoncture de l’Iedom font ressortir une évolution mitigée de l’activité au sein de l’industrie. Le secteur agroalimentaire a bénéficié d’un courant d’affaires favorable au cours du premier semestre 2010, puis d’une stabilisation de l’activité au second semestre. Les industries connexes au BTP ont connu un courant d’affaires dégradé et ont continué à ressentir les effets de l’activité mitigée dans le secteur du bâtiment.
Quels sont les secteurs qui peuvent constituer un levier pour l’île en termes de création d’emplois industriels ?
L’industrie agroalimentaire est un secteur porteur. Aujourd’hui, l’autosuffisance alimentaire de la Martinique est encore faible selon les filières (de 10 à 20 %.) Les productions agroalimentaires concernent surtout la filière canne/rhum/sucre (trois mille neuf cents emplois directs et indirects). Le rhum est le premier produit d’exportation de l’industrie agroalimentaire devant les boissons non alcoolisées. Il peut bénéficier de la croissance du marché en France hexagonale mais également à l’international (en Asie notamment.)
La Martinique a des produits de terroirs uniques et doit jouer sur ses avantages comparatifs. La grande distribution est un maillon important dans la promotion des produits de l’industrie agroalimentaire.
Qu’en est-il du BTP (ndlr : Bâtiments et Travaux publics) ?
Le secteur des industries connexes au BTP a souffert du ralentissement économique et de la chute de la demande des investisseurs dans des programmes de défiscalisation. Ce secteur pourrait connaître une orientation plus favorable avec l’accélération des projets liés à la construction de logements sociaux et à la mise en œuvre progressive du plan séisme.
Quelle place occupe l’industrie martiniquaise dans les échanges internationaux ?
Si l’on compare les exportations industrielles vis-à-vis des importations, la place est encore faible. En 2010, les exportations industrielles couvraient environ 12 % des importations industrielles.
Plus des deux tiers des importations martiniquaises proviennent de l’Union Européenne. Parmi celle-ci, la France hexagonale demeure le principal fournisseur de la Martinique totalisant 1,4 milliard d’euros, soit 54,2 % de la valeur des importations de l’île. L’Amérique du Nord totalise deux cent trente-sept millions d’euros de produits importés et constitue également un partenaire commercial non négligeable pour la Martinique.
Et à l’export ?
Conséquence directe de l’implantation de la SARA en Martinique, les DFA (Départements français d’Amérique) demeurent les principaux partenaires à l’export de la Martinique. Ils sont destinataires de 46 % des produits exportés (154 millions d’euros). Ces exportations sont constituées à près de 80 % de combustibles et carburants à destination de la Guadeloupe et de la Guyane. Second partenaire, la France hexagonale concentre 44,6 % des exportations. Elles sont principalement composées de produits issus de l’agriculture, de la pêche (93,5 millions d’euros) et de l’industrie agroalimentaire (32,6 millions d’euros au total).
Qu’en est-il des échanges avec ses partenaires caribéens ?
Les départements français d’Amérique se situent dans une position relativement atypique au sein de leur espace régional. Jusqu’alors tenus à l’écart des principaux accords commerciaux et économiques de la Caraïbe, ce sont les territoires les plus étroitement liés à leur métropole. Corollairement, ils présentent la spécificité d’utiliser une langue (le français) et une monnaie (l’euro) minoritaires au sein d’une zone parfois considérée comme une « méditerranée américaine » (Atlas Caraïbe.)
Néanmoins la signature, fin 2008, d’un Accord de partenariat économique (APE) entre l’Union européenne et les pays du CARIFORUM, regroupant une quinzaine de pays caribéens, constitue une opportunité historique pour les DFA d’accroître leur insertion régionale. Cet objectif est d’ailleurs actuellement très fédérateur puisqu’il est ressenti, côté français, comme un axe stratégique du développement plus endogène des outre-mer. Côté caribéen comme côté sud-américain, les Régions ultrapériphériques (RUP) françaises semblent également susciter un certain intérêt de par les possibilités qu’elles offrent en termes de débouchés directs (niveau de développement économique élevé pour la région) et indirects (accès facilité au marché européen).
Propos recueillis par MC
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